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LE FESTIVAL AVEC PASSE

Le Festival de Cannes célèbre un anniversaire : son 55ème numéro. Et comme tous les anniversaires, que ce soit celui de votre supermarché du coin ou celui d’un mensuel spécialisé, vous avez le droit à des bonus, des cadeaux, des promos… Le grand cirque cannois n’échappe pas à la règle. La salle des sables pour des projections à la belle étoile, les projecteurs de lumière le long de la croisette, la nouvelle Renault, les nouvelles têtes de l’Oréal, … Mais pour Cannes il s’agissait surtout de revenir à ses origines.
Par exemple, ce sont aussi les 25 ans de la Caméra d’or, prix notoire qui récompense les premiers films en compétition toutes sélections confondues, d’un dessin animé DreamWorks à un film de Carole Laure. Pour le coup, on a réunit deux anciennes Présidentes du Jury (Géraldine Chaplin et Marthe Keller) ainsi que certains des anciens vainqueurs. Le favori semble un film mexicain intitulé Japon. Il doit y avoir une raison. Cette caméra est une promesse et une assurance-promo pour sa diffusion. De fait des cinéastes comme Goupil, Jarmusch, Torres, Devers, Nair, Van Doramel, Anh Hung ont connu les félicités du 7ème Art. De même, Bouge pas, meurs et ressuscite, Petits arrangements avec les morts ou encore Atanarjuat se sont vus plébiscités par un public averti. Mais que dire des autres ? Déjà portés disparus ? Le seul à être toujours présent est son créateur : Gilles Jacob. Il a le don d’ubiquité.
L’autre idée fut de faire le remake de la véritable première édition, celle de 1939. Un jury présidé par l’incontournable Jean d’Ormesson, académicien mis au vert en venant au bord de la Grande bleue, pour évaluer ce qu’aurait pu être le palmarès d’alors. Le jeu ne valait certainement pas une Palme ; d’abord tous les films n’y étaient pas. Ensuite le cinéma a fabriqué sa mémoire, ses souvenirs, son propre patrimoine en 63 ans. Les dés sont pipés. Cecil B.De Mille se voit quand même emporté ce prix baroque, post-mortem, pour Pacific Express ; Judy Garland (Le magicien d’Oz) et Michelle Morgan (La loi du nord) ont eu les honneurs d’un hommage plein d’espoir pour leur carrière.
Autre rattrapage, la projo du Resnais, Je t’aime, Je t’aime, qui avaité subit la dictature d’un mai 68 qui distilla la révolution jusqu’au Palais. Il est interdit d’interdire. Les projections de films semblaient alors faire exception. 2002 célèbre ainsi le souvenir. La mémoire est au cœur de la plupart des films. Il y a une certaine cohérence à tout cela : regarder le passé c’est aussi mieux affronter l’avenir.

La vérité, rien que la vérité

Si la critique se doit de refléter une chose essentielle, c’est bien le plaisir, avant même l’analyse, que prend l’individu spectateur à la vision d’une œuvre.
Après avoir parcouru distraitement le sacro saint tableau quotidiennement remis à jour du film français rendant compte de la côte de popularité des films en compétition, j’en viens à me poser quelques questions quant à l’honnêteté de certains confrères. Leur notoriété est pourtant censée laisser imaginer certaines qualités qui les distinguent du commun des cinéphiles.
Ainsi, on ne pourra oublier l’accueil particulièrement chaleureux réservé au film d’Alexander Payne About Schmidt , dont le rôle principal est magistralement tenu par Jack Nicholson. Comment interpréter le fait que le film ne soulève qu’une approbation tièdasse, si ce n’est carrément une moue de mépris, alors que la salle était bidonnée à chaque trait d’humour que réserve le récit et accorde une ovation incontestable en fin de projection ?
Manque de considération pour un jeune réalisateur peu connu en France, mais qui a déjà fait ses preuves outre Atlantique ? On remarque une certaine sollicitude à l’égard de certains auteurs canoniques et respectables, même lorsqu’ils laissent entrevoir une sérieuse baisse de régime somme toute bien naturelle.
Manque de crédit accordé à une comédie, rire n’est pas sérieux, qui sait pourtant trouver une véritable profondeur dans les thèmes universels et contemporains qu’elle aborde ? Il est toujours valorisant de s’extasier sur un long maniéré qui laisse pensif devant son hermétisme…
Au-delà de la sensibilité subjective de chacun, il est primordial de préserver une honnêteté significative de ses propos, au risque d’abuser son lectorat et les artistes qui gravent la pellicule. A l’occasion de la présentation d’Irréversible de Gaspard Noé, nous sommes les premiers à nous prendre le chou en de longues discussions qu’il faut clôturer au risque de ne jamais pondre de critique. Une seule obsession, être vraiment en accord avec soi même par respect pour ceux qui fabriquent le cinéma.

  (C)Ecran Noir 1996-2002