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Un jour si blanc

Semaine critique - Films en sélection
/ sortie le 29.01.2020


UN HOMME EN COLERE





J’ai toujours eu le sentiment qu’elle me cachait quelque chose

Après Winter brothers en 2018, le réalisateur islandais Hlynur Palmason est de retour avec une forme de polar lent et presque contemplatif dans lequel la tension monte par vagues, jusqu’à la submersion totale du spectateur comme des personnages. Il s’agit pourtant moins d’y percer le mystère de la mort accidentelle qui ouvre le film que d’y épouser presque parfaitement l’état d’esprit d’Ingimundur, veuf inconsolé qui n’accepte pas la disparition de sa femme, et s’enferme peu à peu dans la douleur incommensurable qui l’étreint, malgré la très belle relation qui l’unit à sa petite fille.

Si le récit peut presque sembler convenu (Ingimundur soupçonne sa femme de l’avoir trompé), c’est la réalisation, audacieuse et au cordeau, qui séduit. Dès l’ouverture, on suit longuement une voiture qui roule sur une petite route islandaise plongée dans le brouillard. C’est juste avant l’accident. Puis c’est une séquence en plan fixe sur une maison en ruines, qui peu à peu reprend vie sous nos yeux. Le temps passe ainsi sous nos yeux de manière presque étirée et tranquille, sans précipitation aucune, à l’image du récit qui ne cherche aucun effet spectaculaire, et joue sans cesse l’atmosphère contre l’explication, l’ellipse contre l’action.

Le spectateur doit alors accepter le rythme asynchrone du récit, et se laisser entraîner dans la dérive pleine de rage du personnage. Ce dernier, magistralement incarné par l’acteur Ingvar Eggert Sigurðsson (qui collectionne les prix d’interprétation), ne cherche jamais à plaire, ou à apitoyer. C’est au contraire un bloc rigide et froid de douleur et de colère mêlées que la folie ébranle. Pour lui, le deuil et la résilience se matérialisent par la traversée d’un long tunnel expiatoire (au sens propre comme au figuré) au bout duquel peut enfin apparaître la lueur vacillante d’une lumière.

MpM



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