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Halte (The Halt - Ang Hupa)

Quinzaine des réalisateurs - Compétition
/ sortie le 31.07.2019


JUSTE LA FIN DU MONDE





« Voilà ! Danse ! Danse, petite chérie ! »

Pour son seizième long-métrage, le réalisateur philippin plonge le spectateur dans un récit d’anticipation long et éreintant.

Dictature nocturne

En 2034, suite à d’énormes éruptions volcaniques, le soleil ne se lève plus sur l’Asie du Sud-Est. Plongée dans le noir, la population philippine vit sous le joug d’un dictateur fou. Plusieurs épidémies ravagent le continent tandis que les morts se comptent par millions.

Dès les premières minutes de Halte, Lav Diaz crée une atmosphère dont on ne ressort pas indemne. Pour accentuer la noirceur de la situation, le cinéaste également scénariste et monteur a recours à un sublime noir et blanc aux accents apocalyptiques. La population (sur)vit ainsi dans la terreur et doit faire avec les couvre-feux, l’armée qui est à la merci du président Nirvano Navarra, les drones omniprésents et les maladies.

Véritable plongée dans un pays pas si fictif que ça et rongé par la corruption, Halte a le mérite de porter une critique honnête et justifiée de nos sociétés contemporaines focalisées sur l’individu et le pouvoir. Avec une nonchalance déconcertante, Lav Diaz prend ici un malin plaisir à dresser des parallèles entre un possible futur, la dictature de Ferdinand Marcos, l’Allemagne nazie et l’URSS collectiviste. C’est parfois peu subtil mais cela a le mérite d’éclairer le spectateur sur les véritables intentions du cinéaste : nous faire repenser le pouvoir que l’on donne à nos gouvernements.

Bouillon de thématiques

Bien qu’un peu plus court que ses films précédents, Halte a 4h36 pour nous présenter toute une galerie de personnages. Entre le dictateur sadique et qui entend des voix, les résistants peu conscients du danger, le groupe de rock en roue libre, la prostituée qui performe comme les robots sexuels et le commando d’élite dirigé par un couple lesbien en pleine crise, Lav Diaz sa lâche et offre de nombreuses pistes à suivre à celui qui regarde cette oeuvre déconcertante.

Car si ce drame proche de la science-fiction a de quoi réjouir sur le papier, l’auteur de From What is Before (Léopard d’or en 2014) et The Woman Who Left (Lion d’or en 2016) s'amuse à ralentir le rythme grâce à de nombreux plans sur la pluie. Cette pluie qui lave les rues mais ne parvient pas à nettoyer les péchés. La caméra est souvent statique et semblable à de la vidéo de surveillance. Un choix artistique qui pourrait convaincre s’il ne finissait pas par amoindrir l’impact du récit principal.

En voulant à la fois montrer le courage et la perte d’espoir du peuple, Lav Diaz peine à réaliser un film pleinement cohérent. Les séquences s’enchainent, certaines se rejoignent et l’esthétique est unique. Mais cela ne nous convainc pas. Il eut été plus simple de choisir un seul angle d’attaque pour décrire la violence du monde dans lequel nous vivons et qui semble captiver le réalisateur. A défaut, il signe une oeuvre trop spirituelle pour que les scènes d’action sortent du lot et trop technique pour que le spiritualisme touche.

Loin d’être ratée, cette dystopie souffre de ses répétitions et d’intrigues qui n’aboutissent parfois nulle part. Malgré de nombreux personnages superficiels, Halte est néanmoins sauvé par le jeu de Joel Lamangan, absolument hilarant en dictateur timbré et le physique de Piolo Pascual, formidable action hero.

wyzman



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