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La fille inconnue

Sélection officielle - Compétition
Belgique / sortie le 12.10.2016


FILM CONNU





"C'est nous les enquêteurs, pas vous !"

Il n'y a guère que l'identité de la jeune fille du titre qui soit inconnue dans ce nouveau film des frères Dardenne, simili polar social qui explore (encore) la question de la culpabilité et de la rédemption. Car pour ce qui est de la construction, de l'écriture, des thématiques et des rebondissements, on est au contraire en terrain connu pendant presque la totalité du film.

L'enquête, notamment, est bâtie sur le même modèle répétitif que le long chemin de croix du personnage de Deux jours et une nuit, leur précédent opus, une succession de conversations censées apporter la paix aux deux héroïnes (la première en lui permettant de garder son boulot, la seconde en apaisant son sentiment de culpabilité) tout en dressant en filigrane un "portrait" de la société contemporaine. Une fois de plus, les frères les plus célèbres du cinéma belge livrent un film didactique et moralisateur dans lequel leur personnage principal fait l'effet d'une Sainte se sacrifiant pour expier ses propres pêchés et en profiter pour remettre tout son entourage sur le droit chemin.

Malgré le talent d'Adèle Haenel qui apparaît dans un registre différent de ce qu'elle a l'habitude de faire (plus douce et empathique, moins grande gueule), le personnage est terriblement monolithique, imperturbablement lancé dans une croisade qui finit par l'absorber tout entière. Mais au lieu de faire de cette obsession quelque chose de maladif qui conduirait la jeune femme sur le chemin de la folie, les réalisateurs la traitent au première degré, comme une démarche logique et salutaire. Face à cette métaphore peu subtile de l'indifférence des citoyens européens face au drame des réfugiés (qui sonnent à notre porte et à qui nous n'ouvrons pas, les conduisant à une mort certaine), on a toutefois envie de rétorquer que si elle voulait vraiment être utile, Jenny ferait mieux de s'occuper des migrants encore vivants plutôt que d'utiliser autant d'énergie pour faire le travail de la police. Au passage, bonjour les clichés (une femme noire forcément prostituée, forcément immigrée clandestine) et les grosses ficelles (entre les coïncidences énormes et les approximations douteuses)...

Cette énième parabole des frères Dardenne s'avère ainsi non seulement didactique et pleine de bons sentiments, mais également d'une naïveté gênante quand il s'agit de faire la leçon au spectateur (et avec lui à la terre entière) tout en traitant aussi légèrement la cause et les gens que l'elle est censée défendre.

MpM



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