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Georges Devereux
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Jimmy P

Sélection officielle - Compétition
France


COMMENT JE ME SUIS ENNUYÉE





"Dans les rêves, on essaye de se dire des choses à soi-même."

Il peut être fascinant de parcourir l'inconscient d'un homme, à la recherche des causes de ses maux physiques. Comme une enquête passionnante où le criminel se dissimule dans les rêves et les souvenirs du passé. Malheureusement, ce n'est pas très cinématographique, à moins de céder au spectaculaire, ce à quoi se refuse Desplechin. Pour raconter la rencontre entre l'anthropologue Georges Devereux et l'ancien soldat James Picard, il a donc dû trouver des stratagèmes lui permettant de retranscrire à l'écran les longues conversations entre le patient et son thérapeute.

Il déploie pour cela tout l'attirail de mise en scène à sa disposition : champs contre champs, plans larges puis plans très rapprochés, flashbacks, voix off, séquences oniriques... Il varie aussi les décors et agrémente l'intrigue principale d'intrigues parallèles donnant lieu à des scènes de transition tantôt bucoliques, tantôt amères. Le problème, c'est que les rouages de cette mécanique bien pensée sautent aux yeux des spectateurs. Comme un ouvrage dont on admire la construction ingénieuse à défaut de le trouver beau ou intéressant.

Alors, même si le réalisateur tente de varier points de vue et effets de style, son récit (statique pas définition) tourne rapidement en rond. Les acteurs ne parviennent pas vraiment non plus à dynamiser leurs échanges. Mathieu Amalric passe de l'exubérance à la sobriété sans raison apparente (même sa vue semble miraculeusement s'améliorer en cours de film), et Benicio del Toro assure le minimum syndical. Même la piste du racisme anti-indien est à peine esquissée.

Ce qui se voudrait à la fois comme le portrait touchant d'un homme et un hymne aux bienfaits de la psychanalyse tombe au final complètement à plat. Peut-être parce que l'exercice de l'analyse est un processus si ténu et si progressif qu'il est insaisissable de l'extérieur, ce qui laisse au spectateur une sensation de frustration extrême.

Avec un sujet qui peut évoquer Le discours d'un roi (un face à face entre deux hommes dont l'un essaye de soigner l'autre), Arnaud Desplechin passe à côté de tout ce qui faisait le sel du film de Tom Hooper : la sensibilité, la finesse d'écriture, l'humour, la relation humaine chaleureuse et la force d'interprétation. Preuve que d'un film à l'autre, un sujet similaire peut conduire au pire comme au meilleur.

MpM



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