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The Housemaid

 

L'ivresse de l'argent (The Taste of Money)

Sélection officielle - Compétition
/ sortie le 23.01.2013


DIRTY SEXY MONEY





«- Partager le même lit de façon platonique, c’est absurde.»

L’ivresse de l’argent est une suite lointaine du précédent film d’Im Sang-soo, The Housemaid. On a sauté une génération. Mais le traumatisme d’une femme de ménage immolée dans la magnifique maison reste présent. Comme un fantôme qui vient hanter les consciences de chacun.
C’est d’ailleurs tout le problème du film du cinéaste coréen. Avec L’ivresse de l’argent, il se répète sans apporter quoi que ce soit de neuf à son cinéma. Il nous raconte la même histoire, de la même manière. C’est toujours aussi classieux. Mais ici, le scénario, les situations, les personnages semblent sortis d’un de ces soaps américains de type "Dynasty" ou "Dallas". Ce manque d’originalité plombe un film dont les tragédies familiales nous semblent bien trop prévisibles et convenues.

On peut toujours arguer que le style y est. Les plans sont élégants, les décors de très bon goût, les acteurs plastiquement beaux, et même leurs parties de jambes en l’air sont chics comme il faut. Mais le propos n’a pas changé depuis The Housemaid. Nous écrivions alors que le réalisateur dépeignait avec perversité et cynisme un monde mesquin, asservissant, artificiel et enfermé dans sa caste sociale élitiste. Rien n’a changé. Le mépris s’ajoute aux différentes « qualités » de ces monstres au-dessus des lois (et des règles), corrompus, obsédés, cupides, alcooliques. Se mouvant dans un univers de luxe et se complaisant dans la luxure, cette famille est en fait en décrépitude : chaque morceau se décolle du mur, inexorablement, sous le regard d’un « esclave » candide et d’une héritière qui assume son humanité et ses sentiments. Ce duo paraît étranger à ce clan et ses rites. La froideur de l’œuvre n’est, hélas, pas réchauffer par leur bonté. Bien sûr, grâce à eux, le film est moins noir que The Housemaid. Malheureusement aussi, L’ivresse de l’argent évolue lentement vers une morale plus classique, oubliant l’étouffement à la Polanski en préférant la mièvrerie de feuilletons et autres "télénovelas" du même genre.

Les protagonistes sont sans doute trop stéréotypés pour nous surprendre dans leurs intentions. Même la coriace et manipulatrice vieille bique, une belle salope de cinéma pourtant, semble avoir des airs de déjà vu. La déraison les emporte un par un, étouffant toute tentative de dérision. Le film prend trop de temps pour mettre en place les grains de sable dans le rouage. Et certains sont un peu risibles, comme s’il fallait faire des compromis avec des schémas d’écriture.

Reste un honnête divertissement très esthétisé, de manière ostentatoire. Cette oeuvre sera mineure dans son œuvre, qui a le mérite de mettre en lumière une société coréenne conservatrice rongée par ses vices. On en voit toutes les obscénités. Mais Im Sang-soo enferme la folie dans un environnement glacé et glaçant, où même les actes les plus torrides ne nous chauffent pas la peau. L’assagissement des personnages, bien loin des excès, même maladroits, de The Housemaid, semble avoir contaminé tout son film, presque assommé malgré les délires de cette Phèdre moderne incarnée avec finesse par Youn Yuh-Jung. Alors, oui le flacon est magnifique, mais l’alcool est trop léger pour nous enivrer.

vincy



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