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Tender son - The Frankenstein Project

Sélection officielle - Compétition
Hongrie


AU NOM DU PERE





"- Qui est mon père ?
- Tu n'as pas de père.
"

Kornel Mundruczo revisite le mythe de Frankenstein en réfléchissant aux rapports entre créateur et création (notamment lors du casting, où les acteurs apparaissent comme de la "matière morte" à modeler) mais aussi à la nature de la filiation et aux responsabilités qu'elle implique. Ainsi, toute l'histoire se rejoue au sein d'une famille recomposée qui explose au contact de ce membre supplémentaire et non bienvenu. Comme dans Delta, le précédent film du cinéaste hongrois, le retour du fils prodigue n'éveille en effet aucun enthousiasme, si ce n'est du côté de sa soeur adoptive. Après avoir été abandonné, Rudi se sent cette fois injustement rejeté. Et plus il essaye de se faire aimer (auprès de sa mère, de sa soeur, de son père), plus il souffre de ne pas y parvenir. D'où ses crises de violence qui est le seul mode de communication qui lui ait été transmis.

L'idée forte du scénario est d'avoir confié le rôle du meurtrier à un jeune homme qui semble la pureté incarnée. Il parle doucement et regarde le monde de ses grands yeux candides avant de tuer ignoblement. Il le fait sans colère, sans éclat, avec l'air d'un enfant qui vient de faire une bêtise. Mais quand il n'y a personne pour vous condamner (et donc potentiellement vous pardonner), comment prendre la mesure de ses actes ? Comment prendre conscience des conséquences, ou même des notions de bien et de mal ? En cela, Rudi n'est pas un monstre, mais parce qu'il est considéré et traité comme tel, il finit par le devenir.

C'est pourquoi Kornel Mundruczo parvient à le rendre touchant, à lui donner cette once d'humanité qui apporte un peu de tendresse au film. Peut-être moins esthétisant que dans Delta, il fait le choix d'une mise en scène classique et stylisée qui fonctionne aussi bien dans les plans fixes sur les personnages que dans les scènes de déambulation. Ainsi, le décor principal (symboliquement destiné à être détruit) matérialise à l'écran les méandres psychologiques des personnages. Ceux-ci passent leur temps à chercher quelqu'un ou quelque chose et à se cacher dans cet immeuble labyrinthique rempli d'escaliers et de pièces secrètes. Exactement comme dans le monde actuel, chacun tente (vainement) de trouver sa place, que ce soit dans la société, dans une famille ou dans sa propre existence. Et s'il s'avère que cette place n'existe nulle part, il ne reste alors plus qu'à disparaître.

MpM



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