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Interview Soumia Malinbaum : le cinéma et l entreprise

 

Rien de personnel

Semaine critique - Séances spéciales
France / sortie le 16.09.2009


PLEIN CADRE





Le générique de Rien de personnel laisse augurer du meilleur. Une soirée rituellique à la Georges Franju (Judex) et proustienne à la Raoul Ruiz (Le temps retrouvé) se déroule dans les salons d’apparat d’un château musée. Un œil géant de verre, des squelettes, des viscères exposés en vitrine annoncent un jeu de massacre. Une cérémonie à l’organisation démoniaque pour faire tomber les masques comme les têtes sur l’autel du capitalisme. Plus qu’une critique du monde de l’entreprise, Rien de personnel propose une étude de moeurs sur le thème du double. Pour illustrer cette dualité, la lumière du chef opérateur Christophe Orcand offre au film un contraste somptueux : l’or sophistiqué des lustres de la réception opposé au blanc glacial de la neige dans la nuit noire. L’or trop brillant pour être vrai de la sphère sociale. Au sens propre comme au figuré, le blanc givré des névroses intimes. Michel Gokalp, avec la délectation d’un Alain Resnais, lâche ses personnages dans l’espace clos du château. Chacun devient le reptile qui se mord la queue et s’inocule son venin, le dindon de sa propre farce.
Un coach se fait passer pour un employé à la traîne. Dans les chiottes, il croise un homme de ménage qui lui vole son costume et devient un faux PDG. Sous couvert de soirée de lancement, le vrai Président organise un plan de licenciement. Séquestré dans les mêmes chiottes que celle du coach dépouillé, lui aussi perd toute sa superbe...
Tour à tour dominantes ou victimes, manipulatrices ou impuissantes, les créatures se dédoublent et s’épient sans vraiment se (re)connaître.

Le miroir se brisa

Dans une mise en scène d’une élégante sècheresse, le cinéaste emprunte les pas de ses protagonistes avec une mécanique de construction rappelant celle de La Terrasse d’Ettore Scola. Une séquence d’ancrage vue à chaque fois sous un angle différent cimente les ramifications du récit. Miroir scénaristique qui se répond et se déforme avec nuance dans le premier tiers du film. Hélas, au fur et à mesure, la subtilité du procédé s’étiole au profit de rebondissements qui épaississent l’intrigue et caricaturent la psychologie des caractères.
L’homme de ménage forcément pur se substitue à un patron évidemment cynique. Les femmes, à la botte de leur supérieur hiérarchique, doivent leur position chez Muller autant à leurs charmes qu’à leurs compétences. Enfin, à l’heure de la diversité, tous les protagonistes sont blancs de blancs excepté un groom noir vêtu de rouge, apparition des plus furtives.
Sur la scène de son petit théâtre décadent, il est regrettable que Rien de personnel ne montre pas le monde actuel de l’entreprise écartelé entre une tradition héritée du XIXe siècle et la mondialisation galopante. Cependant, grâce à sa direction d’acteur remarquable - Pascal Greggory en tête - et sa belle facture technique, ce premier long-métrage laisse espérer un second opus non pas plus personnel, mais moins bancal. À suivre…



benoît



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