39-98 | 99 | 00 | 01 | 02 | 03 | 04 | 05 | 06 | 07 | 08 | 09 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19


 
 
Choix du public :  
 
Nombre de votes : 19
 












 
Partager    twitter



festival-cannes.com
site internet du film

 

Yumurta (Oeuf)

Quinzaine des réalisateurs - Compétition
Turquie / sortie le 23.04.2008


LE HEROS DE LA FAMILLE





“Mon père a fleuri.”

A l’heure où les productions cinématographiques sont plutôt à la surcharge visuelle et sonore, Yumurta apparaît comme une œuvre délicieusement anachronique. Marqué par une esthétique dépouillée, le troisième film de Semih Kaplanoglu décline l’épure contemplative sous toutes ses facettes : absence de bande musicale, dialogues minimalistes, longs plans séquences statiques. Une réalisation économe et maîtrisée qui évoque nécessairement le cinéma de Ozu, de Bresson, dont le réalisateur se réclame d’ailleurs. Kaplanoglu compose chacun de ses cadres avec une approche picturale, utilisant toute la profondeur de champs disponible de façon à donner du sens à l’image dans ses moindres détails et recoins. Les longs plans séquences, de fait, devancent les déplacements des personnages et donnent au temps, élément primordial du film, une présence quasiment matérielle. L’image se construit dans un double mouvement invisible : du personnage de Yusuf à son environnement, de l’environnement au personnage. Car il s’agit d’un voyage intérieur. Celui d’un homme qui s’était exilé en métropole pour enterrer ses racines rurales et qui revient dans son village natal pour enterrer sa mère. Celui d’un poète discrètement adulé par ceux-là mêmes qu’il voulait oublier et qui, contraint d’affronter à nouveau ses origines, se redécouvre lui-même. Tout fait écho à son itinéraire identitaire émaillé de symbolisme, comme cette trace de sang laissée par la bête sacrifiée lors d’un rituel qu’il efface frénétiquement de son front. D’abord spectateur de sa propre existence, il est comme étranger à ses émotions et à sa culpabilité latente jusqu’à ce que celles-ci explosent au terme d’une nuit insolite en pleine nature. Premier volet et conclusion d’un triptyque consacré au personnage de Yusuf, Yumurta demande de l’attention, appelle à la réflexion. Tel un œuf, il est à la fois plein et ouvert à d’autres perspectives.

Karine



(c) ECRAN NOIR 1996-2024