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la première guerre mondiale au cinéma

 

La France

Quinzaine des réalisateurs - Compétition
France / sortie le 21.11.2007


BAND OF BROTHERS





"- Ce que tu veux, c'est mourir.
- Non, retrouver mon mari.
- C'est la même chose !
"

Etonnant film qui fait mine de reconstituer fidèlement la France de 1917, avec ses campagnes désolées et ses soldats au bout du rouleau, et crée peu à peu un univers singulier et poétique où les personnages semblent perpétuellement prisonniers d'un songe. Le style de Serge Bozon (Mods) est immédiatement perceptible dans cette balade éthérée et oppressante qui va au-devant de la mort avec une charmante désinvolture. Ici, la guerre n'est ni un prétexte, ni le sujet central du film, mais un élément du décor que les personnages ont en permanence à l'esprit. Même s'ils n'en parlent presque pas, elle est au cœur de chacun de leurs gestes et de leurs paroles, et permet la lente montée en pression qui débouchera finalement sur une explosion de violence. Et pourtant surgissent au cours du voyage des séquences de pur lyrisme et de fantaisie décalée comme la lecture de l'Atlantide ou le sauvetage improvisé des soldats empoisonnés.

Le plus frappant, bien sûr, c'est l'utilisation que le réalisateur fait de la musique. Plusieurs séquences chantées viennent rythmer la marche de la troupe, qui devient alors un étrange groupe de cabaret aux instruments les plus hétéroclites, car fabriqués à partir d'éléments de récupération. Ce détail (rigoureusement véridique) tranche avec la nature des textes (il s'agit de chansons d'amour écrites d'un point de vue féminin) et contribue au trouble ressenti par le spectateur. C'est à la fois très déconcertant et très émouvant, comme un écho lointain et très personnel de la guerre de 14.

Cela évoque également la quête amoureuse de Camille, et à travers elle, toutes les histoires d'amour brutalement interrompues par les guerres en général. Cet aspect romanesque de l'intrigue renforce l'aspect tragique de ce vagadondage désespéré. Pour la jeune femme, ce voyage devient une initiation au détachement, un apprentissage du veuvage. Et curieusement, c'est cette fuite en avant qui lui redonne à la fois vie et espoir. Au cœur du groupe, partageant la même angoisse et les mêmes dégoûts que les soldats, elle se découvre une indéfectible fraternité avec eux. De femme isolée ne pouvant qu'imaginer la vie de tranchées, elle devient partie intégrante de cette réalité qui lui échappait. On entrevoit alors la portée du titre, un brin prétentieux, choisi par Serge Bozon. La France, bien sûr, est là sous nos yeux, dans cette troupe, cette fraternité de soldats blessés et las. Camille peut alors, symboliquement, retrouver son mari et rentrer chez elle.

MpM



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