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L'avocat de la terreur

Certain Regard
France / sortie le 06.06.2007


L’HOMME EN COLERE





"- Vous défendriez Hitler ?
- Je défendrais même Bush.
"

Jacques Vergès a tout du personnage de fiction : romanesque, mystérieux, séduisant… sans oublier des "amis" célèbres (parfois tristement il est vrai) et un sens de la répartie sans pareil. Pour quelqu’un comme Barbet Schroeder (qui s’était attaqué à Amin Dada dans les années 70), il est le sujet de documentaire idéal, avec en guise de seconds rôles, des gens nommés Andreas Bader, Mao ou encore Polpot. Un documentaire dénué de tout commentaire et filmé comme une enquête haletante dans les coins les plus chauds de la planète : Cambodge, Algérie, Chine…

Ce qui intéresse le réalisateur, ce sont les accointances de l’avocat avec le terrorisme international. Méthodiquement, thématiquement, comme un écheveau que l’on déroule, le film suit les pistes lancées par les proches de Vergès ou les experts qui ont accepté de témoigner. De son entrée dans le combat pour l’Algérie indépendante en 1957 avec le procès de Djamila Bouhired, égérie de la cause, à son implication dévouée aux côtés de la terroriste allemande Magdalena Kopp, en passant par sa disparition entre 1970 et 1978 ou son choix de défendre Klaus Barbie, Schroeder analyse tout, aligne les faits et recoupe les témoignages. Quitte à placer son "personnage" face à ses contradictions.

Celui-ci ne se démonte bien sûr pas pour si peu et ses interventions sont au contraire autant de morceaux de bravoure. Malin et habitué aux joutes verbales, il confesse avec gourmandises quelques vétilles, se récrie quand on l’accuse de choses graves et met systématiquement les rieurs de son côté. Difficile de démêler les fantasmes du véridique, les mensonges des aveux sincères, et le réalisateur ne s’y risque pas, la vérité étant probablement un soigneux mélange de tout cela… Alors, avec une patience infinie, il décortique la "nébuleuse" Vergès, mêlant des interviews téléphoniques de Carlos, des documents de la STASI ou encore des témoignages d’anciens criminels repentis, et laisse entrevoir un réseau vertigineux d’intérêts et de contacts.

Plus le film lève de lièvres (connexions en tout genre, pressions sur la justice, raisons d’état…), plus on est fasciné par un homme apparemment capable d’avoir été mêlé à tant de grands événements en tirant toujours son épingle du jeu. A travers lui, ce sont cinquante années de politique internationale qui défilent sous nos yeux, avec rétrospectivement un petit air prophétique. C’est au cours des années 80, au moment des tensions avec l’Iran, que se serait manifesté pour la première fois en France un islamisme révolutionnaire et violent. Vingt ans après, tout cela prend un autre sens.

MpM



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