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Persépolis

Sélection officielle - Compétition
France / sortie le 27.06.2007


PERCEE A JOUR





"- J'avais deux obsessions : pouvoir me raser les jambes et devenir le dernier prophète de la galaxie."

Persépolis compense par le fond ce qu'il échoue dans la forme. Pourtant il n'y a rien à dire du casting vocal, la direction artistique - entre expressionnisme et estampes - de la qualité technique ou même du montage qui fait du film d'animation un divertissement haut de gamme et jamais ennuyeux. Le seul et véritable reproche que l'on peut faire à Persépolis est plutôt celui de ne pas avoir été plus animé. La bande dessinée s'accroche et rend le dessin souvent trop fixé et pas assez en mouvement. Le contraste entre l'encre et la lumière est splendide. Mais le film n'arrive jamais à se transformer en autre chose qu'un théâtre de marionnettes en ombre chinoise.
Heureusement, le film est doté d'un solide scénario, d'un humour plaisant et de personnages bien écrits. Mieux, c'est bien le script du film qui permet à la BD de sortir de sa narration par cases. En usant du flash back, et s'agrémentant de couleurs pour le présent, Persépolis se métamorphose. La noirceur du propos historique, dramatique persiste à s'harmoniser avec la dérision et l'ironie de l'auteur (et donc du sujet). En confrontant les aspects négatifs des deux mondes - l'Occident et l'Iran - Satrapi réussit à bien transmettre sa vision de l'exil, c'est-à-dire une déchirure individuelle, une insatisfaction perpétuelle, une recherche de voie médiane. Ce n'est pas la sagesse ou l'amour que cherchent Marjane, mais la liberté. Celle de s'exprimer : pouvoir dire un "Ta gueule!" à Dieu, la vérité en classe, "je veux divorcer" à son mari. S'exprimer par le dessin, la musique (incluant le surprenant Iron Maiden et le duel Abba versus Bee Gees), la fête. "Eye of the Tiger" produit un moment culte... Il ne faut pas non plus manquer sa crise de croissance à l'adolescence qui fait dire à Darrieux : "Nom de Dieu comme tu as grandit. Tu vas pouvoir attraper les couilles du Seigneur!" De même sa dépression l'entraînera sur la voie de la guérison à travers une image choc : des jambes pas épilées. Les fleurs, les étoiles, les vagues font du dessin animé un univers profondément féminin léger, romantique. Mais quelques images crades, quelques expressions crues façonnent aussi ce long métrage en épreuve initiatique tout publics.
Car au-delà de ces séquences jouissives, le film n'oublie pas de dénoncer la cruauté et la lâcheté d'un régime, la poésie d'une grand-mère qui met du jasmin dans le soutif, la débilité culturelle ambiante (Godzilla, Inspecteur Derrick), l'égoïsme des occidentaux. On comprend que son "désarroi est immense" face à la corruption, la terreur, la peur qui anéantit les consciences et le courage.
Persépolis n'éclipse aucun sujets même tabous. Il reste cependant une jolie histoire d'une gamine rêveuse et idéaliste qui grandit dans un monde quand même assez pourri, mais qu'elle persiste à vouloir voir très beau, comme des illustrations qui font revivre ceux qui sont éloignés ou ceux qui sont morts. Ode à l'exode et à l'intégration, il est aussi un hymne nostalgique à ceux qui sont restés intègres.

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