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Il cuore altrove (A Heart Elsewhere - Le coeur ailleurs)

Sélection officielle - Compétition
Italie


Cœur trop patient





« - Si j’étais une femme, jamais je ne sortirai avec un type comme moi.»

Il y a des peines de films comme il y a des peines de cœur. Ce cœur est définitivement ailleurs. Loin des sentiments, des effusions, des passions ! Il est à l’image de son héros : malhabile avec ce qu’il ressent, et terriblement naïf. L’écriture est classique, pour ne pas dire un peu vieux jeu. Comme un film d’autrefois, moralement correct. C’est une autre époque. Ce film n’est pas contemporain. Il regarde ailleurs, lui aussi, vers un passé qui ne réveille aucune conscience. Ce parfum à l’eau de rose envahit ce romantisme adolescent. Tout est sage. Tout est mort. Même l’ire semble feinte. Et comment croire à ce personnage d’aveugle (mal) jouée par la très belle Vanessa Incontrada ?
Avati y va avec ses gros sabots pour nous faire comprendre la psychologie de son personnage principal, forcément sympathique. Forcément par ce que vous ne pouvez pas le haïr. Ce prof pas comme les hautes, la voix puissante, un brin fantasque, très érudit, plaisantin, puceau (à 35 ans) n’est qu’un grand bêta naïf. Un cas clinique. Le prof est assez mal assorti à la mondaine. L’antagonisme entre les deux suggère la seule partie intéressante du scénario : cette opposition entre deux mondes. Celui qui voit mais ne sait pas mentir, et celle qui ne voit rien mais manipule à merveille. Quand l’un s’intéresse aux écrits des grands poètes latins, elle ne se concentre que sur le destin de son ancien amant. Lui la regarde, elle regrette de ne plus se regarder. La liaison est fatale, et on le comprend très vite.
Car tout cela est bien lourd. Angela nous annonce d’entrée son rôle d’ensorceleuse. Nello nous bassine avec la détresse amoureuse de Lucrèce. A la moitié du film, vous savez à quoi ressemblera la fin. Il faut tout le génie de Giannini et ses réparties très italiennes pour nous maintenir en éveil. Mais le « burlesque » ne modernise pas la désuétude du film. Ce beau livre d’images qui aurait pu être un captivant « soap » n’aura servi qu’à déniaiser un vieil adolescent fragile.
On aurait rêver à plus d’ardeurs et moins de courtoisie, notamment dans cette mise en scène trop polie pour être honnête. Cœur de pierre, il nous laisse de marbre. Produit par la Rai, son conservatisme est presque inquiétant : il fuit tous les sujets sociaux et politiques de l’époque, ce qui est assez inconcevable dans un film italien. A trop regarder dans les années 20, à trop se pencher sur une histoire d’amour dénuée d’intérêt, Avati s’est coupée de son époque. Sans doute, a-t-il « la testa altrove ». La tête ailleurs.

(Vincy)

Vincy



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