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|  LVT , WKW, ET DES CANARIS
Le Festival se conclut sur une leçon de cinéma par Kar-wai. Son dernier film est avec celui de Von Trier, le plus intéressant
cinématographiquement, tout en gardant une dimension populaire. Le danois
et le chinois ont apporté au cinéma une nouvelle manière de raconter
l'amour et la vie. Tous les deux nous ont bluffés ou éblouis simplement en
utilisant des moyens modernes et un cinéma dans l'air du temps. C'est très
sympa de se référencer à Godard, Antonionni, ou encore Bunuel (voir
chronique de lundi), mais il est important que les MS (voir chronique de jeudi) passent le relais à des figures de proue au regard actuel.
Von Trier a su bouleverser l'image avec des plans serrés, des cadres
approximatifs et des caméras numériques, et donc une image vidéo. Tout en
conservant l'émotion. Kar-wai a su mélanger les influences, celles de la
Nouvelle Vague comme du vidéo-clip, tout en adaptant les angles de vue, en
trafiquant les couleurs et le visuel, en réduisant son film à sa plus
simple nudité. Dans les deux cas, la musique a une importance primordiale
(voir chronique de mercredi) et participe à l'écriture. En dix ans, ces deux cinéastes ont apporté leur observation singulière sur les êtres
humains et leurs déchirements. Les deux sont revenus aux années 60 avec
leur film de l'an 2000.
C'est réjouissant. Et, sans se mouiller (pas eu le temps de me baigner dans
la mer), on leur décerne une double Palme d'or, pour leurs oeuvres à la fois
généreuses par le plaisir qu'elles procurent, et exigeantes par la qualité
cinématographique (et donc artistique) qu'elles possèdent.
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| Ceci dit le bon crû de cette année fut ponctué de thèmes divers et variés,
amusant à noter. L'infidélité (l'adultère) était au coeur de plusieurs
films, dont le Kar-wai. De nombreux films parlaient en plusieurs langues,
confrontaient plusieurs cultures. Ce métissage, ce chaos des civilisations
a du faire le bonheur de la compagnie de sous-titrage. La rencontre des
peuples (que ce soit Japon/Chine, Mexique/USA, Roumanie/Mali/France ou
encore Tchécoslovaquie/USA) pose le problème de l'immigration et du
racisme. Hélas encore d'actualité.
Les cinéastes ont aimé les bus, les canaris, les singes, et prônent le
savoir comme sauvetage universel de l'Homme opprimé. Les colonies et leurs
rapports avec les colonisateurs sont un sujet thématique récurrent (Guizi lai Le, Bread and Roses, Le Tableau noire, Capitaines d'Avril...). Les chants dans les films, une tendance amorcée depuis 2-3 ans et qui prend
aujourd'hui de l'ampleur... Tout comme le théâtre, omniprésent, que ce soit
dans Chunhyang, Code Inconnu, Esther Kahn, Vatel, Trolosa, et même Dancer
in the Dark...
On n'oubliera pas les costumes (voir première chronique), et donc les films
d'époque, de Louis XIV aux années 70.
Une chose qu'on attendait et qui n'est pas venue, c'est la déferlante des "
points.com ". Beaucoup de marketing, peu de substance. Peu de sites au
Marché du Film. Et peu de sites dans le Palais des Festivals. Le web est
devenu un élément naturel de Cannes, mais le cinéma résiste toujours et
encore à cet envahisseur numérique. A juste raison. Cannes c'est le 7ème
Art. Il y a bien eu des annonces (médias), des conférences (mitic) et les
courts d'une minute d'Icuna dans le cadre de la quinzaine. Mais pas de
doute, un Von Trier, un Kar-wai ou un Kollek, c'est bien mieux, dès le
matin, à 8.30, avec un grand écran, au milieu de deux milles personnes.
Toute la magie est là. En attendant celle plus strass, de la soirée du
palmarès, avec Deneuve pour remettre la Palme d'Or.
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Retour vers le futurSamedi 20 mai, 10h03 : end of the Festival, pour les journalistes tout du moins. Le dernier film de la
sélection officielle vient de sachever, lheure
devrait forcément être au bilan, aux pronostics. Sauf
que lenthousiasme est loin dêtre au rendez-vous.
BofÉ lonomatopée ne cesse de courir dans les couloirs
du Palais, décidément privé de la moindre excitation.
Le Festival avait pourtant tout fait pour entretenir
lattente jusquau bout, alimentant même les rumeurs
qui annonçaient que le film de Wong Kar Wai ne serait
pas prêt à temps. Les journalistes, par lodeur
alléchée, sont effectivement venus en masse : le film,
même non mixé, a bien été projeté, et reçu, comme 90%
de la sélection, avec déception.
De toute façon, on sentait dès hier que les jeux
étaient faits : rangs clairsemés, public dissipé,
sonneries de portable ininterrompues, huéesÉ «The
Yards », de James Gray, a fait les frais de la
lassitude de ces messieurs, dont lavis est définitif
: le Festival fut terne, le Palmarès ne pourra être
que décevant. Et si Lars Von Trier fait figure de
favori, cest uniquement par défaut. Est-ce par esprit
de contradiction ? Beaucoup ont trouvé leur palme en
dehors de la compétition, notamment avec Ang Lee et
son «Tigre et Dragon », le vrai chouchou de ce
Festival.
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| On devrait être habitué à cette attitude désabusée,
ces moues méprisantes et ces commentaires acerbes. On
la assez répété, le Festival de Cannes est plus un
lieu de pose que de vraie cinéphilie. Mais disons-le
une bonne fois pour toutes : ce cru 2000 fut loin
dêtre mauvais, certes pauvre en surprises mais riche
en vrais moments de cinéma : il faudrait être fou pour
bouder son plaisir.
Il suffit dailleurs de reprendre le programme de la
compétition pour sapercevoir que chaque journée (bon,
peut-être pas la première, daccord) a livré au moins
un film remarquable, au sens premier du terme :
- jeudi, «Harry, un ami qui vous veut du bien »,
inachevé mais bien tenté
- vendredi, «Le Tableau Noir » : les réalisatrices
simposent en Iran
- samedi, «Infidèle » ou la succession de Bergman
assurée
- dimanche, «Yiyi » : lémotion dans la simplicité
- lundi, «La Noce », Kusturica est russe!
- mardi, on triche : «Tigre et Dragon » ou le film de
genre sublimé (mais hors compétition)
- mercredi, «Dancer in the Dark » : LE choc signé Lars Von Trier
- jeudi, «Eureka », LA découverte
- samedi, «In the Mood for Love » pour lunivers
envoûtant de Wong Kar Wai
Si tout cela (plus la légèreté de Neil Labute, Amos
Kolleck ou des frères Coen) ne suffit pas à votre
plaisir, messieurs, renoncez au cinéma ! Il est normal
despérer être transporté à chaque Ïuvre présentée, il
est tout aussi honnête davouer son simple bonheur à
voir de bons films.
Petit espoir: le journaliste nest jamais aussi
difficile quà Cannes, et sassagit bien vite au
moment de la sortie nationale des films présentés ;
comme si, avec le temps, il retrouvait tout son
discernement.

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