© Allociné / Ecran Noir 1998
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Peter Mullan, prix d'interprétation masculine à Cannes.
«Jouer sans savoir la suite» (Interview complète dans Libération, 14 oct.98)
Son nom est Peter, Peter Mullan, et il est écossais, qualité qu'il
partage avec son personnage de «Joe», dans le film de Ken Loach.
Qualité qui s'exprime dès la moindre allusion à ce «pays entièrement
décimé par Thatcher et qui sera indépendant quand ma fille aura
20 ans» (elle est encore une enfant). L'Ecosse, où il est né, tout
là-haut près d'Aberdeen, enflamme Peter Mullan: en mai, il vint
d'ailleurs en kilt chercher son prix d'interprétation masculine à Cannes.
Mais Peter Mullan admire Ken Loach tout aussi ardemment.
D'abord, pour la méthode de travail du cinéaste. «On n'a pas le script
en entier et la seule chose à laquelle on pense, ce sont ces enveloppes
brunes qu'on va recevoir tous les deux jours, qui, chacune,
contiennent les prochaines scènes à jouer. Moi j'adore ça. Je ne sais
pas si je serai vivant au prochain envoi. Alors je me précipite sur ces
pages, je regarde si je m'en sors ou si Joe... se fait renverser par un
bus! Et ma partenaire Sarah, que je viens de rencontrer, bang, est-ce
elle qui va se faire renverser? Ça veut dire qu'à chaque scène, on va
investir toutes ses émotions comme à la dernière, qu'on a intérêt à être
vivant, vraiment. J'aime ça. J'avais déjà pratiqué ce genre de choses
avec la troupe de théâtre à laquelle j'appartenais, le Political Theater
Group de Glasgow, mais il s'agissait plutôt d'improvisations. Alors
qu'avec Ken Loach, tout est complètement écrit, ordonné, ce qui
vous déleste de la sorte de préciosité qui menace lorsque ce sont vos
propres mots. Avec Ken, on est sans arrêt sur la corde raide, mais on
se sent aussi, non seulement en sécurité, mais parfaitement à l'aise.
Durant six semaines, on vit une sorte de fantasme en se foutant de ce
qu'il adviendra. On est complètement investi, sans être conscient du
produit. Par exemple, on ne sait jamais où est la caméra et après la
première semaine de tournage, on s'en tape, on s'amuse, c'est tout. Je
me suis tellement marré sur ce tournage! C'est la grande qualité de
Ken Loach: je suis sûr qu'il aurait fait un entraîneur de foot brillant!»
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