1979
Apocalypse Now
de Francis Ford Coppola
(U.S.A.)

Gros plan sur l'année 1979
Les Prix et Jurys

La première mondiale d'Apocalypse Now à Cannes en mai 1979 se déroule dans la controverse et la confusion. La version présentée n'est pas encore complète, même après plus de quatre ans de travail acharné et près de deux ans de montage. Le mixage de la bande sonore n'est qu'approximatif, car il s'agit d'une nouvelle approche conçue par Walter Murch visant à redistribuer les éléments sonores sur six pistes séparées (il s’agit là du premier son véritablement ambiophonique). Seule la séquence de l'attaque des hélicoptères est parfaitement calibrée. Mais surtout, Coppola n'a toujours pas trouvé comment terminer son film.

Il existe pour lui trois ou quatre fins possibles. Finalement, il se décide : au Festival de Cannes, le capitaine Willard (Martin Sheen) tue le colonel Kurtz (Marlon Brando) et prend sa place (le film s'arrête probablement au moment où Willard émerge de l'antre de Kurtz et s'immobilise en haut de l'escalier). À Cannes, l'ambiguïté de l'oeuvre persiste jusqu'à la fin : Willard va-t-il devenir un autre Kurtz? Quelques mois plus tard, Coppola change d'idée : aux États-Unis, sur les copies en 70 mm, Willard tue Kurtz et quitte le repaire cambodgien, sans toutefois alerter l'aviation. Et lors du tirage en 35 mm, Coppola offre une troisième variante : Willard s'en va et avertit l'aviation; la destruction du temple est montrée en surimpression sur le générique.

Les problèmes ne s'arrêtent pas là. La presse reproche à Coppola sa mégalomanie et l'accuse d'exercer des pressions sur le jury. L'auteur Françoise Sagan, membre de ce jury, a d'ailleurs dénoncé publiquement l'ingérence de Coppola. Malgré tout, Apocalypse Now remporte la Palme d'or, ex æquo avec Le Tambour de Volker Schlöndorff.

Aujourd'hui, dix-huit ans plus tard, l'oeuvre monumentale de Coppola occupe une position privilégiée parmi tous les films tournés sur la guerre du Viêt-nam. Il se distingue par l'ampleur de son propos, l'audace de son approche et la virtuosité de sa réalisation. Il offre une vision foudroyante des désastres de la guerre et certaines séquences sont devenues d'inoubliables morceaux d'anthologie. Coppola propose ici une puissante réflexion sur les pièges horrifiants que recèle le pouvoir guerrier. Le film transcende donc les limites du genre pour atteindre l'envergure d'une odyssée, renforcée par la présence mythique de Marlon Brando. Plus encore que The Deer Hunter, plus que Platoon, plus même que Full Metal Jacket, Apocalypse Now se révèle LE grand film sur la guerre du Viêt-nam. C'est le chef d'oeuvre de Francis Coppola.

André Caron


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